Chapitre 13 :Marie et Anne, mère de Samuel

Chapitre 13

Marie et Anne, mère de Samuel  (1)

Quand on parle des femmes dans l’Ancien Testament, on ne peut voir en elle, qu’une figure lointaine de Marie. Dans le mariage, elle est l’épouse de Joseph: « Ne crains pas de prendre chez toi Marie ton épouse » (Mt 1, 20). Dans la virginité, elle fut la seule à être vierge avant l’enfantement et après l’enfantement. Dès que l’ange Gabriel lui annonce la naissance d’un fils à qui elle donnera « le nom de Jésus » (Lc 1, 31), sa réponse fut immédiate. La mère du Messie doit être vierge selon la prophétie d’Isaïe: « Voici que la vierge concevra et enfantera un fils » (Is 7, 14). Et la question qu’elle posa à l’ange fut tout simplement: « Si je suis vierge, comment puis-je avoir un enfant? ». Une question sublime, bien différente de celle de Zacharie, qui montra son peu de foi (Lc 1, 18). Pour cela, la réponse de l’ange vint du ciel: « L’Esprit Saint viendra sur toi » (v. 35). Enfin, Marie fut la mère, à tel point que l’évangile de Jean ne nous donne pas le nom de celle qui est sa tante maternelle (Jn 19, 25 : sa mère et la sœur de sa mère, Salomé. Mais il dit deux fois: « Mère de Jésus ». Aux noces de Cana (Jn 2, 1). Et aux pieds de la croix, quatre fois il est dit: « mère ». Mais cette mère n’est plus seulement la mère de ce crucifié, mais la mère du « disciple qu’il aimait » (Jn 19, 26), c’est-à-dire de chacun et de chacune de nous.

Dans cet article, nous comparerons Marie avec Anne, la mère de Samuel. Elle attendit son fils et le reçut comme le fruit de la grâce. Elle chanta sa joie à la naissance de ce fils. Enfin elle le consacra au Seigneur pour être son prêtre et son prophète avant de passer ta flamme à Saül puis à David.

1. Anne la mère

Le premier livre de Samuel nous présente un homme. Son nom est Elqana (1S 1, 4), ce qui signifie « la possession de Dieu ». Son village s’appelle Ramataïm-Sophim: (v. 1) non seulement une hauteur (ramah), mais deux hauteurs. Et cela pour « les guetteurs » comme le signifie le mot « çophim ». Et le texte nous présente sa généalogie.

Cet homme ressemblait à Abraham: celui-ci avait, avec Sarah, Hagar l’égyptienne: avec la princesse, il y avait la servante, l’expatriée. Et l’on dit qu’elle est égyptienne. En fait Abraham, celui dont le père est élevé, ne peut avoir pour femme qu’une princesse. C’est en ce sens qu’on peut lire le psaume 45. Cette épousée est une reine, car femme de roi. Sur sa tête une couronne, comme sur celle de son mari. Et en faite, Elqana a une femme. Elle s’appelle Anne, ce qui signifie: tendresse, affection, grâce. Anne ressemblait à Sarah: tous deux sont stériles. Cependant le texte dit d’Elqana quand il offrait un sacrifice : « Mais à Anne, il (Elqana) donnait une part d’honneur » (v. 5). Et le syriaque dit: « une double part ». Cela signifie qu’elle est la femme préférée. Et quand elle montra sa tristesse, elle s’entend dire de la bouche de son mari : « Est-ce que je ne vaux pas mieux pour toi que dix fils? » (v. 8).

Comme Hagar fut à côté de Sarah ainsi, Péninna à côté d’Anne. Son nom signifie « la perle » ou « les rameaux de la vigne ». Et elle avait l’avantage sur Anne car elle avait beaucoup d’enfants (v. 2). Pour cela, elle « ne cessait de lui faire des affronts pour l’humilier » (v. 6). Mais les choses vont bientôt changer à tel point qu’on pourra chanter à propos d’elle et d’autres : « Pousse des acclamations stériles... car... les fils de la désolée (sont) plus nombreux que les fils de l’épousée » (Is 54,1).

*  *  *

Ici, Anne fut différente d’Abraham. Celui-ci, en effet recourt aux moyens humains, sur le conseil de sa femme. Mais d’Anne le texte dit : “Pleine d’amertumes, elle adressa une prière au Seigneur en pleurant à chaudes larmes » (v. 10). Sa prière fut exaucée. Enceinte, elle « enfanta un fils et elle l’appela Samuel » (v. 20) c’est-à-dire « au nom de Dieu ». Anne dit: Je l’ai demandé au Seigneur. Et le texte de Qumran ajoute: « Je ferai de lui un nazir pour toujours ». Mais il n’est pas encore temps de parler du vœu que fit Anne au Seigneur.

Le prêtre Eli qui servait au temple de Silo, la prit pour une « ivre » (v. 13). En faite, elle était ivre de Dieu, en attendant sa grande joie avec le fils qu’elle avait attendu avec tant de douleurs. Ici, elle ressembla à Sarah dont le nom de son fils, Isaac, signifie le sourire, le rire.

Avec cet enfant, la vie d’Anne changea totalement. Elle qui montait tous les ans au sanctuaire pour le sacrifice annuel, en compagnie de son mari et de sa rivale, refusa de le faire cette année. Elle préféra partir toute seule. « Attendons que l’enfant soit sevré: alors je l’emmènerai » (v. 22).Et comme Sarah prit sa revanche, de même Anne. Elle dit à Eli : « Je suis la femme qui se tenait près de toi, ici même et adressait une prière au Seigneur. C’est pour cet enfant que j’ai prié, et le Seigneur m’a concédé ce que je lui demandais » (v. 26-27).

*  *  *

Anne fut la mère de quelqu’un de grand dans l’histoire du peuple de  l’Alliance. Et la Vierge Marie fut la mère de Jésus dont il est dit : « Il sera grand, et sera appelé fils du Très Haut” (Lc 1.32). Non seulement il oindra David, comme fit Samuel (1S 16, 12-13), mais il sera le fils de David et recevra son trône (Lc 1, 32).

Ce fut le miracle avec Anne, avec Elisabeth, femme de Zacharie, et mère de Jean Baptiste, toutes deux stériles; mais avec Marie, parler du miracle est peu de chose. C’est toute la divinité qui prit chair de la chair de Marie, c’est le ciel qui s’établit sur la terre, c’est le Verbe qui prit demeure parmi nous.

Ici, saint Basile dit: « Dieu sur terre, Dieu parmi les hommes! Cette fois il ne promulgue pas sa loi au milieu des éclairs, au son de la trompette, sur la montagne sainte, dans l’obscurité d’un orage terrifiant, mais il s’entretient d’une façon douce et paisible, dans un corps humain avec ses frères de race. Dieu dans la chair! Ce n’est plus celui qui agit par intermittence comme les prophètes, mais celui qui assume pleinement la nature humaine et par sa chair qui est celle de notre race, ramène à lui tout le genre humain ».

Et Denys Bar Salibi. L’Evangile « distingua dans la Vierge Marie par rapport à la naissance du Sauveur, ce qui est surnaturel et ce qui est naturel. De la première branche, sa conception sans mariage et sans semence humaine, la permanence de son infinité pour avoir mis au monde (son fils). De la seconde tranche, le temps de la conception qui est de neuf mois, la naissance d’une femme. Ensuite, je comprends par la naissance du Christ trois sortes de la génération : Premièrement, son incarnation dans le sein de la Vierge et sa naissance d’elle. Deuxièmement, la sortie de sous la loi de Moïse pour la loi nouvelle. Cela eut lieu par le baptême. A partir de ce temps (de baptême), l’homme  corporel fut régénéré spirituel. Troisièmement, sa résurrection d’entre les morts. Elle est comme une génération de la mort à la non-mort, de la vie du monde fini à la vie du ciel immortel ».

2- Cantique d’Anne, cantique de Marie

Avec la naissance de Samuel, Anne pouvait chanter sa joie et lancer son cri de merci « au Seigneur à qui sont les colonnes de la terre » (1S 2, 8). Ce Dieu est si grand que ses ennemis baissent la tête, car il a la pleine connaissance de leurs actions. Cependant, ce Dieu si majestueux dans sa sainteté, sa puissance, intervient dans le monde, dans les événements concrets, dans la vie de tous les jours pour mettre au pas les méchants. Que sert à quelqu’un d’être fort, bien nourri, riche en enfants, d’être en bonne santé, d’avoir beaucoup de biens, d’être bien né ? Dieu place ceux qui s’enorgueillissent par de tels dons, avec le faible, la femme stérile, le pauvre, le mort, la personne de bonne condition. Même ceux qui sont au schéol, avec les morts ne peuvent échapper à la souveraineté de Dieu, car il est le Créateur qui a établi l’ordre et la justice dans l’univers.

A ce sujet dit Théodoret de Cyr : « Ce passage de l’Ecriture veut enseigner au lecteur à ne pas se confiner uniquement dans le mariage pour avoir un enfant, mais à demander aussi l’aide du Créateur. En effet, c’est le propre de l’agriculteur de jeter la graine dans la terre, tandis qu’il appartient à Dieu de donner son développement à la semence ; ainsi le propre du mariage est l’union conjugale, mais il appartient à Dieu d’accorder à la nature de façonner l’être vivant. Cela, Anne le savait d’expérience, puisque c’est après avoir vécu longtemps avec son mari sans avoir mis d’enfant au monde, qu’elle recourt au Créateur. Et Celui-ci, à cause de sa prière instante et de ses larmes, guérit sa stérilité et la rendit féconde ».

Oui, la prière. Dans le même sens, Jean Chrysostome dit à propos de ce Cantique d’Anne : « Rien de comparable à la prière, mes bien-aimés, rien de plus puissant que la foi. Ces deux vérités, l’histoire d’Anne les met en lumière. C’est avec sa prière et sa foi pour toute offrande qu’elle se présenta devant Dieu, et elle obtint pleinement ce qu’elle désirait… Tous vous avez entendu (dans la lecture du jour) raconter comment elle pria et supplia, comment elle toucha le Seigneur et reçut ce qu’elle demandait : elle mit au monde Samuel, elle l’éleva et le consacra au Seigneur ».

Il faut dire que la prière d’Anne ne s’arrêta pas à sa petite situation, mais elle mit sa confiance dans le Seigneur, le Juge de l’univers, et le soutien de son Messie. Et cette référence au Messie regarde non seulement le roi David qui représente le Seigneur sur le mont Sion, mais celui qui seul accomplit toutes les promesses attachés aux rois du peuple de Dieu, Jésus-Christ. Ainsi ce cantique place la vie de Samuel au milieu de l’activité divine qui donne la clé théologique de l’histoire de Samuel et de Saül. Cela nous mène naturellement au cantique de Marie, mère de Jésus, qui célèbre le mystère de l’Incarnation : le Fils de Dieu est devenu le fils des hommes pour élever les hommes à la dignité de fils de Dieu. Oui, le personnage d’Anne nous renvoie à Marie. Avant de commenter le Magnificat (Lc 1, 46-55) nous citons quelques vers d’Ephrem le Syrien, pris aux Hymnes sur la Nativité :

15. Anne avec des larmes amères

Demanda un enfant ;

Sarah et Rébecca

Avec vœux et serments ;

Elisabeth aussi,

De tourments, fut enfin consolée.

16. Bienheureuse Marie qui, sans vœu

Ni prière, en sa virginité

A conçu et enfanté le Seigneur

De tous les fils de ses compagnes

qui furent et qui seront

Ceci fut pris à l’hymne VIII, et dans l’hymne XIII, la comparaison se fait surtout au niveau de l’enfant :

5.  Anne encore pour toi a caressé

Samuel, car ta justice

Etait cachée en lui

qui a mis en pièces Agag,

Comme Tu fis Mauvais.

Il a pleuré sur Saül,

Car ta bonté aussi était en lui dépeinte.

6.  Comme tu es humble,

comme tu es puissant

Ô petit Enfant ! Puissant ton jugement !

Doux, ton amour ;

qui pourrait

Tenir devant toi ?

Ton Père est au ciel

Ta mère sur la terre :

qui peut parler sur toi ?

« Mon âme exalte le Seigneur » (Lc 1, 46). Ainsi commence Marie son chant d’action de grâce. La mère de Jésus dit sa profonde gratitude : Ce que le Seigneur a fait pour elle.

Après la gratitude personnelle (Lc 1, 46-50), c’est la gratitude de tout le peuple de Dieu (v. 51-55) pour l’accomplissement des promesses de l’Alliance : « Il l’avait dit à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa descendance pour toujours » (v. 55).

Dieu a réalisé une œuvre sublime en faveur de Marie. Les motifs ? Non la personne de Marie, qui se dit « l’humble servante » (v. 48). Mais le regard de Dieu. Et si le puissant a fait des merveilles pour celle qui a dit oui le jour de l’annonciation, c’est parce qu’il est le Tout-Puissant. C’est parce que « son Nom est saint » (v. 49).

Que dit Marie ? Dieu dévoile sa miséricorde pour tous en comblant de grâce une seule femme, d’une manière singulière. L’événement de Nazareth, circonscrit dans le temps et l’espace, est un événement du salut universel. Anne s’était arrêté à un peuple parmi les peuples, à une terre parmi les terres. Le chant de Marie est parti de la terre de Palestine pour arriver aux extrémités de la terre.

Nous pourrions comparer le cantique d’Anne et le cantique de Marie, verset par verset. Mais ce serait long et fastidieux pour une lecture spirituelle. Cependant il est important de regarder la structure de l’un et de l’autre cantique. C’est un parallélisme antithèque : La stérile va avoir beaucoup d’enfants. Celle qui était moquée est à l’honneur maintenant… Telle est la souveraine liberté de Dieu qui relève celui qui est humilié et humilie l’orgueilleux.

Telles furent les paroles d’Anne. Quant à Marie, elle déploie dans son chant l’universalité du salut au long de sept affirmations descriptives avec le thème dominant : La miséricorde condescendance que Dieu a manifestée à Marie, humble servante, s’étend à tous les humbles de tous les temps. En face des puissants, des riches, des refus, Dieu a favorisé les humbles, les pauvres, les affamés.

Il est bon de citer une deuxième fois le commentaire de Luc fait par Denys bar Salibi.

v. 46. Mon âme remercie le Seigneur à cause de ses dons ; elle le glorifie parce qu’il a élevé ma dignité et m’a fait la mère de son Fils. C’est comme si elle Lui rendait l’exultation. Après l’avoir élevée au sommet des hauteurs quand il l’a choisie, elle vit que son devoir était de l’exalter, selon la parole : Rendez gloire à notre Dieu ».

v. 48. Elle a dit le motif de son élévation : son humilité. En somme elle a dit : Il a regardé mon humilité pour cela il m’a élevée et a fait de moi la mère de son Fils. Ainsi avait-il élevé l’humilité de Moïse et fait de lui le chef de son peuple. Et depuis le temps où Marie conçut le Dieu Sauveur, toutes les tribus de la terre ont pour devoir de la louer. Sa parole ici est une prophétie dont les siècles virent son accomplissement.

v. 49-50. Une partie des grandeurs qu’a reçue la Vierge, est qu’elle conçut le Fils sans semence, qu’elle l’enfanta sans douleur, que le sceau de sa virginité ne fut pas brisé. De telles choses ne sont ni pénibles ni difficiles à Dieu. Mais ses dons et sa miséricorde sont abondants pour ceux qui le craignent, prennent la bonne voie et s’appliquent à la vertu.

v. 51-52. La domination victorieuse de Dieu est puissance. Les hommes et les créatures sont dans la poignée de sa main. Cet avantage sur tous les peuples apparut dans le temps passé. Son bras fit des miracles admirables par l’intermédiaire des prophètes. Mais en ce temps-ci, la force de son bras apparut dans la manifestation de son Fils incarné. Entrent dans la nomination, non seulement ceux dont le vice est l’orgueil, mais encore tous ceux qui renient le Seigneur et désavouent ses bonnes actions. Celui qui revient à l’histoire ancienne, voit que Dieu a dispersé les rois qui opprimèrent son peuple particulier, c’est-à-dire ceux d’Israël ; ensuite il a dispersé les païens, il a éparpillé l’assemblée des juifs, il a brisé la force des hérétiques qui se sont révoltés contre son Eglise. Mais il a élevé de plusieurs degrés, ceux d’Abraham son ami, d’Isaac, des vertueux, des apôtres, des orthodoxes ».

3- Le fils d’Anne et le fils de Marie

Tous deux furent consacrés au Seigneur. Mais il y a loin de la consécration de celui qui est né du sang, d’un vouloir humain, d’un vouloir de chair, et de celui qui est né de Dieu (Jn 1, 13).

Nous commençons par lire Jean Chrysostome : « Le plus admirable chez Anne, ce qui montre, plus que tout, son amour de Dieu, c’est qu’elle ne désirait pas avoir un enfant simplement pour lui-même, mais elle promettait de consacrer à Dieu le fruit de ses entrailles, pour lui offrir les prémices de son sein et recevoir ainsi le salaire de sa belle promesse… Elle n’a encore rien reçu et déjà elle commence sa prière par une promesse. Elle a fait à Dieu l’offrande de son fils en retour du don que Dieu lui fait de cet enfant, alors qu’elle ne tient encore rien entre ses mains. Tel est le motif principal de son ardent désir, la raison pour laquelle elle supplie qu’un enfant lui soit donné… (Elle dit :) Il sera totalement livré à ton service, donné sans partage. Je renonce à tous mes droits. Si je désire devenir mère, c’est uniquement pour donner la vie à un fils ; ensuite je renonce à lui et me retire.

«Elle a devancé Marie quand elle a donné son fils, et en Marie elle a trouvé la plénitude du don. Car Jésus, au Temple, dira à ses parents : « Il faut que je sois chez mon Père » (Lc 2, 49). Mais déjà Marie et Joseph avaient porté l’enfant quarante jours après sa naissance. Ils l’offrirent au Seigneur selon la loi de Moïse : « Tout garçon premier-né sera consacré au Seigneur » (Lc 2, 23; voir Ex 13, 2 ; 12, 15). Mais déjà le Christ avait dit en venant au monde : « De sacrifice et d’offrande, tu n’as pas voulu, mais tu m’as façonné un corps… Alors j’ai dit : Je suis venu ô Dieu pour faire ta volonté (Hé 10, 5-7).

«C’est ce que fit Anne, la mère de Samuel. Le texte du premier livre de Samuel dit d’elle : « Elle fit le vœu que voici : Seigneur tout puissant, si tu daignes regarder la misère de ta servante et donner à ta servante un garçon, je le donnerai au Seigneur tous les jours de sa vie et le rasoir ne passera pas sur sa tête (1S 1, 11).

«Avant de le recevoir elle l’a donné au Seigneur ; et c’est ce qu’elle fera. Elle dira à son mari lors de la fête prochaine : « Attendons que l’enfant soit sevré ; alors je l’emmènerai, il se présentera devant le Seigneur et il restera là-bas pour toujours  (v. 22)».

Jean Chrysostome nous éclaire ici à nouveau dans le Discours 3 sur Anne. «Si Samuel fut son enfant, il ne l’est plus à partir d’aujourd’hui. Il en est de même pour Marie comme le dit l’iconographie. Son fils est là, mais elle ne le regarde pas. Elle est toute à ses pensées. Deux fois on dit d’elle qu’elle méditait le mystère dans lequel elle était plongée. Après la visite des bergers, Luc dit à propos de Marie : « Quant à Marie, elle retenait tous ces événements (et ces paroles), elle les interprétait dans son cœur » (Lc 2, 19). Ensuite, après les retrouvailles au Temple, à l’âge de douze ans, « sa mère retenait tous ces événements dans son cœur » (v. 51).

Voilà ce que dit Jean Chrysostome comme paroles qui peuvent s’appliquer et à un haut degré à Marie :

« Allons donc trouver Anne et apprenons d’elle comment (…) elle se comporta avec le fils qu’elle avait reçu de Dieu. Elle restait dans sa maison, dit l’Ecriture, et elle allaitait Samuel. Tu le vois, elle ne regardait pas seulement cet enfant comme un enfant, mais comme un être consacré à Dieu ; elle l’entourait d’une double tendresse, l’une qui venait de la nature, l’autre de la grâce. A mes yeux, Anne apparaît même pleine de respect pour son enfant, et cela à juste titre.

« Si l’on se propose, en effet, de consacrer à Dieu des coupes ou des vases en or reçus de l’artisan, on les garde dans sa maison en attendant le jour fixé pour la consécration ; on ne les considère pas comme des vases profanes et communs, mais comme des objets sacrés et l’on n’ose pas les manier n’importe comment à la manière de vases ordinaires. Les sentiments d’Anne à l’égard de son enfant, même avant de l’avoir conduit au temple, étaient de cet ordre et encore beaucoup plus forts. Elle l’aimait beaucoup plus qu’on n’aime un enfant ; elle s’occupait de lui comme d’un être appartenant au Seigneur ; elle s’estimait sanctifiée par son intermédiaire… ».

Conclusion

Anne et Marie. Deux figure féminines. L’une vient de la première Alliance avec son fils Samuel. Marie est de l’Alliance nouvelle et définitive dans la personne de son fils Jésus-Christ. Nous les avons suivies dans trois étapes : Le rôle de mère, mais avec cette différence que Marie est vierge et qu’elle conçut du Saint-Esprit. Tandis qu’Anne est stérile et qu’elle attend le don de Dieu, comme Elisabeth, mère de Jean Baptiste. Le cantique d’Anne peut être le premier jet pour le cantique de Marie, avec la note d’universalité propre aux évangiles et surtout à celui de saint Luc. Enfin, ces deux mères offrirent leurs fils au Seigneur, Anne à la naissance, Marie, à la mort, aux pieds de la croix. Toute la Bible est résumée dans « l’histoire » de ces deux femmes. L’une arrive à David, l’autre part du fils de David pour arriver au Fils de Dieu qui nous offre la Loi nouvelle bâtie sur l’amour, la miséricorde et le pardon.

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