Vie d'Ephrem

Ephrem est né dans une famille chrétienne à Nisibe ou dans ses environs autour de l'année 306. Dans sa jeunesse, il subit une influence profonde de la part de Mar Jacob, le premier évêque de Nisibe (308-338) qu'il nous décrit comme un saint et un ascète. Il fut ordonné diacre'!' et le resta semble-t-il toute sa vie, n'ayant été par la suite ni prêtre, ni évêque.

Fut-il ermite comme le disent plusieurs sources à son égard?Il est difficile de dire qu'il a embrassé la vie monastique telle que nous la connaissons en Egypte, ou telle qu'elle se pratiquera en Mésopotamie. Fut-il membre de eette «confrérie» qu'on appela «les fils du pacte» et où la virginité était liée au baptême que recevait l'adulte? Il faudrait peut-être dire qu'Ephrem a vécu la virginité et la chasteté tout en restant dans le monde et sans s'isoler dans le monde. Est-il concevable qu'un homme à l'activité débordante pût vivre loin du monde? Il ne le semble pas.

Il vécut d'abord à Nisibe, cette ville qui fut christianisée, dit la Légende d'Abgar, par un disciple de Notre-Seigneur, et où l'on trouve sûrement des chrétiens, à la fin du ne siècle selon le témoignage d'une épitaphe de l'évêque de Hièrapolisw. En tout cas, du temps d'Ephrem, la ville était en majorité chrétienne; preuve en est que vingt-cinq mille personnes vont la quitter quand J'empereur romain Jovien la livra aux mains de Perses en 363. Ephrem, lui aussi, quitte nisibe et s'installe à Edesse.

Les dix dernières années de sa vie, Ephrem les passe à Edesse, ville à l'est d'Antioche qui fut christianisée assez tôt, puisque deux synodes s'y sont réunis, l'un en 151 pour fixer la date de Pâques, l'autre en 196 pour examiner certains enseignements hérétiques. En 201, une inondation détruit son Eglise et en 282, la ville subit une grande persècutionw. Elle fut célèbre par son école et par des maîtres comme Tatienw et Bardesanes".

Quelle fut l'activité d'Ephrem à Nisibe et à Edesse? Elle fut double: comme maître, il interprète à l'école l'Ecriture Sainte; comme diacre, il enseigne au peuple chrétien la doctrine de la foi et organise la liturgie. De sa première activité, un auteur syriaque Barhadbshaba Arbayé dit dans son Discours sur la fondation des écolesêï ce qui suit: «Après la clôture du Concile (de Nicée) ... Jacques (l'évêque de Nisibe) ouvrit une école à Nisibe ... Mar Ephrem fut établi commentateur par Jacques ... Le bienheureux Mar Ephrem... lorsque la ville fut livrée aux Perses, se retira à Edesse, où il passa le reste de sa vie; il y ouvrit une école, et il y eut de nombreux disciples. Après sa mort, l'école, loin de tomber en décadence, fit de considérables progrès, grâce à l'activité de ses disciples. Le directeur de l'école, Qyoré (au cinquième siècle) regrettait que les commentaires de l'Interprète ne fussent pas encore traduits en syriaque. Mais à cette époque, on commentait d'après les traditions de Mar Ephrem qui, à ce qu'on disait, venaient de l'apôtre Addai»'?'.

De sa seconde activité nous lisons un texte chez Jacques de Saroug à la mémoire de son maître spirituel où il insiste sur deux traits: la défense énergique et fructueuse de la foi contre les hérétiques, le fait qu'Ephrem organise le chant de louange et n'a pas peur d'admettre les femmes à y participer de manière active. Il dit: «Voyant que les femmes ne glorifiaient pas, le Bienheureux jugea, comme un sage, qu'elles devaient louer. .. »(7) Ce maître d'école, ce diacre dans l'église fut aussi le conseiller et le défenseur de son évêque contre les Ariens, comme il fut l'auteur d'hymnes célèbres dont il dirigeait l'exécution à l'église comme maître de chœur. Cette activité multiforme fut déployée par Ephrem surtout au cours des années qu'il passa à Edesse, et elle se termina en 373, année de sa mort. Pallade nous apprend à ce sujet qu'une famine s'étant abattue sur la contrée, le saint alla organiser les secours en faveur des nécessiteux. Un mois après, il mourait.