L’Eglise Syriaque

L’Eglise syriaque

L’Eglise syriaque est appelée ainsi pour deux raisons. Elle est née et s’est développée en Syrie autour du patriarcat d’Antioche. En outre, son patriarche réside aujourd’hui encore à Damas. Sa langue est le syriaque, la langue des Syriens, dont l’origine est l’araméen, langue parlée au temps des Perses des Indes jusqu’au sud de l’Egypte.
L’Eglise syriaque est ausi vieille que l’Evangile, puisque le Christ a parlé en araméen. Sans doute, nous possédons le Nouveau Testament en grec, mais il y eut sûrement des écrits en araméen. Eusèbe de Césarée parle d’un évangile matthéen en cette langue. Sans compter que l’écriteau cloué sur la croix de Jésus portait une inscription en araméen (= hébreu en Jn 19, 20) à côté du grec et du latin. Quant à la première communauté de Jérusalem, elle a d’abord été composée d’Hébreux (qui parlaient l’araméen) quxquels se sont joints des fidèles de langue et de culture grecques. Cette situation aurait pu constituer un facteur de divison sans la sagesse des Apôtres qui insitutèrent les Sept pour le service des chrétiens parlant le grec, se réservant ceux qui parlaient araméen.
L’Eglise syriaque s’est constituée autour d’Antioche. Si en ville on parlait le grec, à la campagne on s’exprimait en araméen qui bientôt deviendrait le syriaque. Quand il y avait une liturgie en ville, on lisait l’Evangile en syriaque (ou araméen), puis en grec, et l’on prêchait en grec. Quand la liturgie se célébrait à la campagne, l’Evangile se lisait d’abord en grec, puis en syriaque et l’on prêchait en syriaque. Cette loi s’appliquait à la Syrie, au Liban, à la palestine, à la Turquie. Et aujourd’hui encore, on constate que dans les villes c’est l’élément melkite qui domine, avec le grec comme langue liturgique, alors qu’à la campagne c’est l’élément syriaque, qu’il soit syrien ou maronite.
Cependant c’est à Edesse que l’Eglise syriaque proprement dite vit le jour. Une légende raconte cette fondation. Le roi Abgar était malade. Il entendit parler de Jésus et lui envoya une délégation pour lui demander de venir le guérir et partager avec lui le pouvoir. Ne pouvant se déplacer, Jésus lui promit d’envoyer un de ses disciples. Ce fut Thaddée qui guérit le roi et convertit son royaume.
Le christianisme s’enracina à Edesse et de là rayonna jusqu’en Arménie et en Géorgie, si bien que la Bible des Arméniens fut traduite à partir du syriaque (et peut-être de l’araméen); quant à la Bible des Géorgiens, elle est liée de manière indirecte à la Bible syriaque.
Il s’agit donc d’un christianisme très ancien. C’est à Edese que le syriaque s’affranchit de son origine de dialecte araméen pour se constituer en langue littéraire. On en retrouvera des inscriptions jusqu’en Chine et en Mongolie. Témoin de cette présence chrétienne, Abercius laissa une épitaphe datée du IIe siècle, qui parlait de la présence des chrétiens dans la plaine et les villes de Syrie et au-delà de l’Euphrate.
Cette Eglise syriaque prendra son visage propre le jour où elle s’insurgera contre l’élément grec de Constantinople. Elle refusa la définition de Chalcédoine et se donna un patriarche, Jacques Baradée. Il organisa cette Eglise qui prit son nom: jacobite. A côtß, se créa une autre Eglise, elle aussi de langue syriaque: c’est l’Eglise maronite qui resta fidèle à son patrimoine syriaque mais ne refusa pas l’enseignement de Chalcédoine qui insiste sur les deux natures du Christ dans l’unique personne. Elle est appelée melkite (melek-roi) comme l’Eglise orthodoxe de langue grecque.
L’Eglise syriaque compta plusieurs école réputées, dont Edesse, Nisible (dans l’actuelle Turquie), Quennesrin. Elle fut riche en monastères à tel point qu’on a pu l’appeler l’Eglise monastique. Elle eut des couvents illustres comme Saint-Gabriel à Tour Abdin (Turquie), Saint-Matthieu à côté de Moussoul (Iraq), Zaafaran, à l’est de Mardin en Turquie.
Ses grands maîtres furent Ephrem, Jacques de Sarough, Rabboula, Philoxène de Mabboug, Sévère d’Antioche, Michel le Syrien - le grand historien -, Jean de Dara, Moïse bar Kepha, Jacques d’Edesse, Denys ba Salibi, Bar Hebraeus qu’on appelle le Thomas d’Aquin de l’Orient. Et dans le domaine biblique, il nous faut citer encore une fois Ephrem († 373) qui commenta l’Ancien et le Nouveau Testament, Moïse Bar Kepha († 903), Denis bar Salibi († 1171) avec un commentaire matériel (ou corporel) et un commentaire mystique (symbolique). Quant aux écrits de Bar Hebraeus sur l’Ancien et le Nouveau Testament, rédigés entre 1272 et 1278, il s’agit d’un volumieux répertoire de gloses relatives à l’exégèse biblique, à la critique de la peshitto (texte biblique officiel en syriaque), de l’Hexaplaire (Hexaples d’Origène en syriaque) et de l’Harkléenne... Malheureusement, la plupart de ces œuvres ne sont pas encore éditées.
Quelle est la situation de cette Eglise aujourd’hui? Elle est divisée en deux:
• L’Eglise syriaque orthodoxe ou antéchalcédonienne (bien que ce terme soit dépassé, les théologiens ayant compris que la différence était affaire de vocabulaire) qui est présente en Orient, mais surtout en Occident du fait de l’émigration massive, en provance de Turquie surtout mais aussi de Syrie, du Liban et de l’Iraq. Son patriarche réside à Damas en Syrie. Elle est apparentée à l’Eglise malabare implantée tout particulièrement dans le sud de l’Inde.
• L’Eglise syriaque catholique, petite branche détachée de la grande Eglise syriaque appelée aujourd’hui orthodoxe, elle est unie à Rome à la manière des différentes Eglises uniates (Grecs catholiques, Arméniens catholiques, Coptes catholiques). Cette union eut lieu au XVIIe siècle. Le patriarche de cette Eglise vit au Liban depuis les persécutions perpétrées par l’Empire ottoman. Les Syriens catholiques constituent une minorité; beaucoup vivent en Syrie et au Liban mais aussi en émigrés.
Quelle est la place de la Bible dans l’Eglise syriaque, qu’elle soit catholique ou orthodoxe? En fait, elle est minime et cela pour deux raisons: une liturgie répétitive qui nourrit exclusivement la vie des fidèles et la pratique de dévotions venues d’Occident qui laissent de côté la parole de Dieu. Sans compter que cette dernière n’est accessible ou presque qu’en syriaque et ne fait l’objet d’aucune explication à destination des fidèles.

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