L’Egypte et la Bible

L’Egypte et la Bible

L’Egypte, berceau d’une civilisation florissante au troisième millénaire, fut en relation avec le monde de la Bible au cours de trois périodes: celle de l’Exode, celle du roi Salomon et des rois qui lui succédèrent, enfin au temps des Lagides, successeurs d’Alexandre le Grand.
1. L’Egypte au temps de l’Exode
Pour comprendre ce rapport de l’Egypte au peuple hébreu, il faut se rappeler la grande invasion des Hyksos, au XVIIIe siècle av. JC. Elle fut le fait, pourrait-on dire, de toutes les tribus qui allaient constituer le peuple d’Israël par la suite. Il faudrait        placer à cette époque le départ de Jaccob et de ses fils pour rejoindre Joseph, le grand vizir. Bien sûr, le texte a été enjolivé et l’histoire de Joseph est tardive, qu’on pense à ce sens du pardon si proche de l’Evangile. Puis, au XVIe siècle, il y eut un mouvement contraire à partir de la Haute Egypte, qui chassa les Hyksos. C’est ce qu’on appelle le premier Exode: les envahisseurs furent repoussés. Mais certains «Hyksos» restèrent en Egypte, ou même y retournèrent à cause des famines sévissant régulièrement en  Palestine. On peut citer à ce sujet trois tribus qui partiront lors de l’Exode fuite, comme on le nomme. Il s’agit de Lévi, la tribu de Moïse et d’Aaron, d’Ephraïm, la tribu de Josué qui entra en Palestine par l’Est, par Moab, et enfin de la tribu de Juda qui s’infiltra par le Sud avec Caleb, les Caïnites... Cet Exode fuite s’organisa autour de la personne de Moïse, un nom égyptien qui signifie à l’origine: «serviteur du Dieu Ra». Par la suite, Ra’ tomba et il ne resta que la seconde partie du nom qui prit une signification sémitique: «celui qui est sauvé des eaux» (Ex 2, 10).
Le texte de l’Exode parle de l’oppression des Hébreux en Egyptes: ils travaillaient dans les terres comme dans les fortifications du Delta. D’autres étaient bergers, comme l’affirma Jacob au pharaon quand il vint en Egypte rejoindre son fils Joseph. Leur désir de partir suscita de la part du Pharaon, qui n’est pas nommé, une vive opposition. Moïse profita des conditions atmosphériques pour annoncer les plaies qui allaient frapper l’Egypte. Enfin, la mort du Pharaon fut considérée comme une revanche de Dieu sur ce souverain qui avait tué les enfants des Hébreux. pharaon permit aux Hébreux de partir. En fait, les trois tribus que j’ai déjà nommées ont fui et sont arrivés au désert du Sinaï, après avoir passé les lacs Amers, ces marécages dont elles connaissaient parfaitement les gués. Bien sûr, l’imagination populaire parla de passage à travers la mer Rouge, alors qu’il s’agissait en fait de la mer des Roseaux. Et puis, tout le peuple vivant au temps de David et de Salomon fut mentionné et pas seulement les trois tribus qui avaient effectivement quitté l’Egypte à ce moment-là. Le chiffre, bien sûr, s’en ressent.
Une fois dans le désert, les Hébreux cherchèrent à retourner en Egypte, un pays très riche en eau, poissons, viandes, concombres pastèques... mais ils furent durement réprimés. Dans une première étape, ils durent se diriger vers le Sinaï. Dans la seconde étape, vers Moab, la porte par où ils passèrent pour rejoindre «la Terre promise».
2. L’Egypte au temps de Salomon et de ses successeurs
En citant la Bible, on aurait pu citer la stèle de Ménephtah, découverte à Thèbes en 1895. Le Pharaon dit: «pillé est Canaan avec tout ce qui est Mauvais. Ascalon est déporté, Gézer capturé; Yanoam est réduit à néant. Israël est dévasté, sa race n’existe plus». Ici, nous serions peut-être en présence d’une référence à la poursuite des Egyptiens à l’encontre d’Israël. Mais tout cela n’est qu’une hypothèse.
Après cette période de l’Exode, c’est le silence total jusqu’au règne de David. Là nous lisons dans 1 R 11, 14-22 qu’un prince édomite, Haddad, s’enfuit à la cour d’Egypte pour échapper à Joab. Par la suite, il y eut un rapprochement entre l’Egypte et Salomon qui épousa la fille du Pharaon psousennès (cf. 1 R 3, 1; 9, 16). Par la suite, le texte biblique mentionne un commerce de transit entre les deux pays. Les chevaux de Cilicie sont livrés à l’Egypte et le chars d’Egypte sont livrés aux rois araméens (1 R 10, 28-29).
Le rôle de l’Egypte allait diminuer avec les invasions assyrienne puis babylonienne. Mais il se poursuivit tout de même par l’entremise de ses alliés en Canaan et en Syrie. Les deux royaumes de Juda et de Samarie étaient concernés. A Jérusalem, il y eut toujours un parti pro-égyptien, contre lequel luttèrent les prophètes, opposés à toute alliance avec les nations païennes. Ainsi vers 721, Isaïe tenta en vain d’empêcher l’alliance entre Akhaz et le pharaon Shabaka (Is 31, 1). Inversement, le roi Josias fut tué en 609, à Megiddo, en essayant de s’opposer au passage des troupes égyptiennes qui volaient au secours de l’Assyrie agonisante. Enfin Jérusalem, assiégée par Nabuchodonosor, espérait un secours de la part de l’armée égyptienne. Le pharaon Apriès tenta une diversion, mais il eut peur et epartit dans son pays. Et Jérusalem tomba en 589.
3. L’Egypte des Lagides
La Bible ne parle pas de relations entre Juda et Israël d’une part et l’Egypte de l’autre, Durant la période perse. Il faut attendre l’arrivée d’Alexendre qui fut reçu, dit-on, par le grand prêtre à Jérusalem et la mort rapide du conquérant en 323 av. JC. Ce furent alors les Lagides d’Egypte qui occupèrent la Palestine jusqu’à la fin du IIIe siècle av. JC. et l’arrivée des Séleucides d’Antioche de Syrie.
Alexandrie avait attribué aux Juifs l’un des quartiers de la ville. Le nombre des Juifs allait augmenter dans cette grande métropole. Philon parle d’un million de Juifs. Chiffre trop grossi, bien sûr, pour une ville qui ne comptait qu’un million d’habitants. Le chiffre de cent mille est plus probable.
En outre, les Lagides qui occupèrent la Palestine eurent de très bons rapports avec les Juifs de Jérusalem et la sympathie de ces princes demeura, même avec l’occupation de la région par les Séleucides.
C’est à Alexandrie que fut élaborée la version de la Bible dite des Septante. Le Pseudo-Aristée raconte que Ptolémée Philadelphie demanda aux Juifs la traduction grecque de la Loi mosaïque. Soixante-douze Juifs traduisirent la Torah en soixante-douze jours. Il faut dire que c’est cette traduction qui est citée par le Nouveau Testament. D’où le désaveu des Juifs de Jamnia qui demandèrent une autre traduction, plus littérale. A la Septante, on ajouta les livres directement écrits en grec: le livre de la Sagesse, la traduction de Ben Sirac, sans oublier les livres de Maccabées et les autres textes de la période intertestamentaire.
Enfin, signalons que le livre des Proverbes de Salamon s’inspira de l’œuvre d’Aménemopé, ce haut fonctionnaire égyptien qui vécut au début du premier millénaire et écrivit un livre de maximes de sagesse, destiné à son fils (Pr 22, 17-24, 22). D’ailleurs, quand on lit le nom des fonctionnaires de Salomon, on peut remarquer le nom de scribes égyptiens qui vivaient a la cour de ce grand roi. Alors, ne nous étonnons pas si nous trouvons des points de contact entre la littérature sapientielle d’Israël et la sagesse égyptienne, si nous découvrons des resemblances en ce qui concerne les instruments du culte: l’Arche d’alliance par exemple, n’est pas sans rappeler les barques dans lesquelles les prêtes égyptiens transportaient les statues de leurs divinitiés au cours des processions solennelles.

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